LETTRE OUVERTE A MAHAMAT KAKA ET MASRA SUCCES, LES « FRERES » DE SANG

L’année 2024 soufflerait-elle une nouvelle ère au Tchad à même d’effacer les traces du 20 octobres 2022 ?

L’année 2024 soufflerait-elle une nouvelle ère au Tchad à même d’effacer les traces du 20 octobres 2022 ?

De coutume, les Africains sont habitués à vivre l’usurpation du pouvoir par les fils (biologiques ou adoptifs) des Présidents décédés ou assassinés. Nous avons les exemples du Togolais Faure Gnassingbé qui succède à son père, Gnassingbé Eyadema Président de la République de 1967 à sa mort le 05 février 2005 ; du Gabonais Ali Bongo Ondimba, plébiscité par le parti au pouvoir pour remplacer son père, Omar Bongo Ondimba aux commandes de 1967 à mort le 08 juin 2009 ; de vous, Mahamat Idriss Déby devenu Président du Conseil Militaire de Transition (PCMT) puis Président de la Transition (PT) après la mort non élucidée de votre père, Idriss Déby, le 20 avril 2021 après 31 ans de règne...

Comme tous les pouvoirs des héritiers, celui de Mahamat Idriss Déby fut contesté par le peuple et leurs portes voix, les opposants au rang desquels vous, Succès Masra, le Président du parti Les Transformateurs. Une contestation active qui s’est soldée par la mort de plus de trois cents (300) jeunes manifestants selon votre propre décompte. Votre détermination à rompre avec le système en place depuis une trentaine d’années et en découdre avec le Mouvement Patriotique du Salut (MPS) et ses alliés de circonstances, les changeurs de l’intérieur, qui militent pour installer la dynastie deby, a renforcé la conviction des jeunes rescapés du jeudi noir et des parents des jeunes qui vous ont suivi et y ont laissé leur vie.

Le 03 novembre 2023, l’ex-ministre de la Réconciliation Nationale du Tchad et l’actuel porte-parole de votre gouvernement a dévoilé le contenu de l’accord de principe de Kinshasa. Dans ce document rendu public, vous, le Président des Transformateurs, vous engagez, entre autres à prendre en compte la Charte révisée et les efforts du gouvernement de transition, notamment le calendrier de retour à l’ordre constitutionnel, laissant perplexes vos soutiens et hypothéquant de fait l’avenir de la lutte démocratique pour le changement. Lutte pour laquelle vous avez entrainé toute la jeunesse tchadienne éprise de Justice et d’Egalité. Heureusement ou malheureusement, l’histoire se répète. Moïse ne verra-t-il pas encore la terre promise ? Qu’est-ce qui a pu bien se passer dans les lieux secrets de dieux ? Stratégie politique, naïveté ou sur les traces de votre père, votre prédécesseur, taxé par vous-même d’éternel accompagnateur ? Désormais, même les opposants accompagnateurs ont droit aux héritiers, peut-être.

Dans votre discours de prise de service, vous avez déclaré et je cite : « Je viens ici comme un FILS […] Je puis dire fermement que l'enfant, quand il arrive sur un champ labouré par son PERE ou son GRAND-PERE, il ne se préoccupe pas si le grand-père a labouré 30% du champ. Ce qui doit le préoccuper, c'est les 70% du champ restant. UN FILS QUI PASSE LE TEMPS A DENIGRER PEUT-ETRE OU A QUESTIONNER LE TRAVAIL FAIT PAR SON PERE N'EST PAS FORCEMENT UN BON UN BON FILS […] », fin de citation. Il ressort clairement dans cette déclaration que vous vous positionnez en FILS HERITIER de votre PERE accompagnateur, hier jeté en pâture et aujourd’hui admiré. Finalement, sommes-nous en train de donner raison à la succession dynastique ? De la présidence à l’opposition le pouvoir se transmet-il désormais de PERE EN FILS ? Les Tchadiens doivent-ils prendre leur mal en patience et souffrir une trentaine d’années de ce mariage incestueux Kaka-Masra avant d’espérer un lendemain meilleur ?

Mahamat Idriss Déby, Assyongar Masra Succès, mes jeunes frères, c’est un pléonasme de dire que le Tchad a tant souffert. Aujourd’hui, vous avez toutes les cartes entre vos mains. Vous êtes jeunes comme ces millions de jeunes sans espoir ; vous êtes jeunes comme ces milliers de jeunes sans emploi ; vous êtes jeunes comme ces centaines de jeunes Tchadiens abattus ce 20 octobre 2022 ; vous êtes jeunes comme ces dizaines de leaders – Patrice Lumumba, Thomas Sankara, Martin Luther King et autres contemporains - qui se sont inscrits du bon côté de l’histoire.

Mahamat Idriss Déby, vous devriez donner les moyens nécessaires à votre frère pour réussir la mission à lui confier. Assyongar Masra Succès, vous ne devriez jamais oublier l’idéal pour lequel plus de 300 jeunes sont tombés ce jeudi noir. En Afrique, les morts ne sont pas morts, nous dit Birago Diop. Dans l’au-delà, leurs âmes vous observent et attendent que leur mémoire soit honorée pour que leur sacrifice ne soit pas vain.

Là est ma contribution pour ce 1er gouvernement de la 5ème République.

Bonne et heureuse année 2024 !

MIARIM Dillah Evariste